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Coronavirus et robes de mariées à Liège: "On pleure avec nos clientes dans la boutique"

Fleuristes, propriétaires de salles, traiteurs, photographes… Les métiers sont nombreux à être frappés par les mesures restrictives qui entourent les fêtes de mariage en Belgique. Brigitte, propriétaire d’un magasin de robes de mariées, s’étonne que son secteur ne soit jamais évoqué. "Nous aussi, on est sur le carreau !", nous écrit-elle via le bouton orange Alertez-nous.

Brigitte a ouvert son magasin il y a trois ans sur les hauteurs de Liège. Contrairement à d’autres, elle peut continuer à exercer son activité. Mais comment travailler sans futures mariées à habiller? L’ancienne "wedding planneuse" ne se retrouve pas seulement face à un nombre trop faible de ventes, elle doit aussi gérer le stock des robes commandées avant l'épidémie pour des mariages qui n’ont pas eu lieu en 2020. À cela, s'ajoutent les émotions des futures mariées, et les siennes. 

J’ai l’impression que ça va durer des années!

Habituellement, d’avril à septembre, son magasin fourmille et ses deux stylistes ne lâchent pas leurs aiguilles. La situation est bien différente cette année. "Mes stylistes sont à 3 ou 4 jours semaine sur le chômage Covid. Pour la première vague je ne me suis pas trop tracassée. Je me suis dit "ça va passer". Le magasin est resté fermé deux mois et on espérait que ça aille mieux. Mais là, je ne sais pas où on va. Pourquoi on n’arrive pas à en sortir? J’ai l’impression que ça va durer des années!"

2019 avait pourtant bien commencé. "On a très bien vendu en 2019 pour les mariages de 2020. Mais sur les 400 robes sorties, 375 mariages ont été reportés. On a donc un problème de stockage des robes de mariées, c’est un volume!".

La vendeuse a contacté chacune de ses futures mariées afin qu’elle vienne rechercher leur robe qui attendait les dernières retouches avant le jour J, qui n’est jamais ou pas encore arrivé. "On leur a bien expliqué la situation et elles ont toutes, à une ou deux exceptions près, été très compréhensives. On est des passionnées et on apprend à connaître chaque mariée, elles ne sont pas juste un bon de commande".

Certaines auront donc acheté une robe en 2019 pour la porter en 2022

"Ce n'est plus du rêve qu'on vend"

Dans ce "cocon", les émotions sont fortes. Et le coronavirus en Belgique n’a pas stoppé ces moments intenses à la boutique, même si désormais, la tristesse et la frustration ont pris le dessus sur les larmes de joie. "Depuis mars, on gère des mariées qui doivent venir rechercher leurs robes sans retouches. Parfois, on pleure avec elles et leur maman! Certaines préparaient cet événement depuis deux ans! Ce n’est plus du rêve qu’on vend…"

Les mariées de Brigitte ont reporté leur mariage en 2021 voire 2022. "Certaines auront donc acheté une robe en 2019 pour la porter en 2022!", souligne la vendeuse, bien consciente que les modes et les goûts changent rapidement, et que ce n'est pas un détail pour ses clientes.

La gérante doit également se préparer à voir revenir des centaines de robes lorsque la situation sera stable et que les mariages reprendront "Comme les dernières retouches n'ont pas été faites, l’an prochain, 375 robes vont revenir vers nous, sans que nous n’ayons plus rien à gagner."

"L’an passé à la même période, j’étais à 400 robes vendues. Aujourd’hui, j’en suis à 130"

Si elle sait qu’elle sera débordée de travail un jour, pour l’instant, Brigitte rêverait d’avoir plus de commandes à gérer. "Je n’ai jamais connu une telle crise. L’an passé à la même période, j’étais à 400 robes vendues. Aujourd’hui, j’en suis à 130." 

Il y a aussi le problème des clientes qui ne viennent pas à leur rendez-vous, ou celles qui en prennent trois fois plus pour pouvoir avoir l'avis de chacune des personnes qui comptent dans ce choix crucial. "Avant, elles venaient avec leur famille et leurs demoiselles d'honneur. Aujourd'hui, elles viennent à deux, ne se décident pas, puis reviennent avec une autre personne, puis encore une autre personne". Certaines ne viennent pas du tout une fois que Brigitte leur fait part de cette contrainte. "Je perds des ventes, car d'autres magasins acceptent, mais ma boutique est trop petite." 

Brigitte accuse le coup, mais elle ne contournera aucune règle. "J’applique les mesures à la lettre. On ne rigole pas avec ça, on est 3 asthmatiques dans la boutique et j’ai moi-même fait plusieurs bronchites!"

On survira, même si moralement, c’est compliqué

Brigitte n’arrive pas à prédire ce qui l’attend, mais elle va de l’avant et serre les dents en attendant des jours meilleurs. "Toutes nos collections de l'année sont là, il n’y en a qu’une par an pour les robes de mariées. Le magasin est plein, il faut qu’on sorte ces robes! Si on ne les vend pas on ne pourra pas racheter la nouvelle collection. Ça fait mal parce que notre objectif a toujours été de ne pas avoir de "vieilleries" dans nos penderies! Mais on a les reins solides, on tiendra et on sera toujours là à la fin de la pandémie. Nos fournisseurs sont payés, nous n’avons pas de dettes. Il faut rester optimiste!  On survira, même si moralement, c’est compliqué."

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