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FAUSSE INFO sur les vaccins: 4 spécialistes démontent les affirmations d'une généticienne française sur une Web TV d'extrême-droite

Un habitant de Montignies-sur-Sambre nous a interpellés via notre bouton orange Alertez-nous. "Nous entendons un peu de tout concernant l'obligation de se faire vacciner contre le Covid. Je viens de regarder une vidéo et je vous laisse vous faire votre propre opinion. Mais je pense que l'on ne nous dit pas tout."

Dominique nous a également écrit. Professeur de physique dans le secondaire, il déplore que de plus en plus de personnes qu'il côtoie doutent de la vaccination à cause, entre autre, de cette vidéo. "Ses arguments sur la dangerosité des vaccins ARN ont des effets délétères et seront certainement à l'origine d'un refus de vaccination chez bon nombre de citoyens peu soucieux de faire des recherches sur les dires de cette femme. J'avoue être à court d'arguments vulgarisés afin de contrer les dégâts parmi, notamment, mes collègues. Je m'adresse donc à vous. Pourriez-vous vous pencher sur cette vidéo et l'analyser de façon objective afin de rétablir la vérité ?", nous demande-t-il.

Une carrière qui la rend crédible

La vidéo en question, parfois censurée mais toujours disponible par exemple ici, montre l’interview d’une généticienne française sur un plateau de télévision. Il s’agit d’Alexandra Henrion-Caude, ancienne directrice de recherche à l’Inserm, l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale. A priori, de quoi mettre en confiance celui qui la regarde.

Elle se montre extrêmement critique envers les vaccins à ARN messager, et particulièrement envers celui développé par Pfizer-BioNTech, le premier à avoir obtenu l’aval de l’Europe et premier des trois vaccins actuellement administrés chez nous.

Désavouée par ses anciens collègues

Avant même de se pencher sur le contenu de cette interview, on constate que l’Inserm a rapidement pris ses distances avec les thèses défendues par son ancienne directrice. "Ses propos ne sont en aucun cas ceux de l’Inserm. Depuis ses débuts, la pandémie de Covid-19 fait fréquemment l’objet de prises de paroles inexactes, de désinformation ou de rumeurs", a réagi l’Institut sur la chaîne de télévision française LCI. Des déclarations "pas tellement différentes des pires des positions complotistes", estime le célèbre généticien français Axel Kahn.

Télévision d’extrême-droite

Ses propos seraient donc inexacts et orientés pour manipuler l’opinion publique. Le fait qu’ils aient été tenus sur le plateau d’une Web TV d’extrême-droite assumée appelée "TV Libertés", est également un élément qui appelle à la prudence.

Vérification

Il serait trop simpliste de disqualifier l’ensemble de ses propos parce que d’autres scientifiques les contestent sommairement. Idem pour le fait d’accepter de parler à un média d’extrême-droite.

Nous avons donc décidé de réaliser une vérification (un "fact-checking") de tout ce qu'elle affirme. Sur l'heure entière que dure l'interview, nous nous sommes concentrés sur la fin de celle-ci où les vaccins à ARN sont spécifiquement ciblés.

Nous avons soumis ses affirmations à plusieurs experts belges :

Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral de la lutte contre le coronavirus et Chef de service des maladies infectieuses au CHU Saint-Pierre de Bruxelles

Eric Muraille, maître de recherches au FNRS, biologiste et épidémiologiste attaché à l’Université Libre de Bruxelles

Laurent Gillet, professeur de vaccinologie à l’Université de Liège

Benoit Muylkens, virologue à l’Université de Namur

La méfiance des gens s'installe sur ce genre d'imprécisions, de fake news

"Je pense que c'est un travail très important. La méfiance des gens s'installe sur ce genre d'imprécisions, de fake news. Bien entendu, nous ne pouvons vous répondre qu'à la lumière des connaissances actuelles, mais bon nombre des affirmations qui sont faites dans le document par cette personne sont fausses", nous explique Laurent Gillet.

Voici les affirmations principales d’Alexandra Henrion-Caude dans cette interview. Alors, vrai ou faux ? Cliquez sur chaque article pour découvrir les arguments des spécialistes.

Le vaccin Pfizer risque d’empirer la maladie ? Faux

L’ARN du vaccin Pfizer peut interagir de façon non-désirée avec notre organisme ? Faux

Pfizer n’a pas évalué les effets pharmacocinétiques, pharmacodynamiques et génotoxiques du vaccin : à moitié vrai

2,7% des vaccinés par Pfizer se retrouvent en incapacité de travail : vrai… mais faux

L’efficacité du vaccin Pfizer n’a pas été évaluée chez les plus de 75 ans : faux

Les anticorps produits avec le vaccin Pfizer pourraient augmenter les chances de faire une forme grave de la maladie : faux

Une personne vaccinée rejette 6 fois plus de particules virales dans sa respiration ? Faux

La vaccination risque de provoquer l’émergence de nouveaux variants : vrai… mais moins que sans vaccination

L’ARN du vaccin Pfizer peut devenir de l’ADN qui peut s’intégrer dans notre génome ? Faux

La demande de ne pas tomber enceinte pendant les essais du vaccin Pfizer cacherait un risque pour les bébés : faux

Des traitements pour guérir du Covid comme l’hydroxychloroquine existent ? Faux

La pharmacovigilance en France ne surveillerait pas les effets secondaires déjà listés par Pfizer ? La Belgique et l’Europe le font…

Des fake news, purement et simplement

Pour nos spécialistes infectiologue, épidémiologiste, vaccinologue et virologue, la quasi-totalité des affirmations de la généticienne Alexandra Henrion-Caude sont fausses. On peut donc parler de fake news, sans présumer des raisons pour lesquelles l’ancienne directrice de recherche de l’Inserm se prête à ce jeu malsain qui sert l’agenda politique de l’extrême-droite française.

Pas la première fois

Enfin, il faut signaler que cette interview n’est pas la seule où Alexandra Henrion-Caude a versé dans les fake news.

Fin septembre dernier, elle affirmait que les tests PCR atteignaient une zone appelée la lame criblée, qui permet de passer des nanoparticules directement dans le cerveau.

De quoi nourrir de nouveau des théories complotistes, alors qu’en réalité, aucun test PCR ne peut atteindre cette zone. En effet, elle est située à la base du cerveau, juste derrière les yeux. Pour l’atteindre, l’écouvillon du test devrait être enfoncé verticalement et passer plusieurs barrières de tissus. Or, il est enfoncé horizontalement pour venir toucher le nasopharynx, dans le fond des narines juste au-dessus de la luette.

Elle est également intervenue dans le film documentaire conspirationniste Hold-Up pour dire que les essais cliniques de phase 3 avaient été sautés, ce qui est également faux.

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