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Dans un entrepôt français, course logistique à réception des vaccins Pfizer

Dans un entrepôt anonyme de la banlieue parisienne, une précieuse cargaison émerge d'une brume glacée: presque dix mille flacons de vaccins Pfizer fraîchement livrés.

Venu tout droit de l'usine de production en Belgique, le camion est passé aux aurores. Les dix cartons qu'il a déchargés ne dépareillent pas au milieu des palettes et des emballages entassés dans le long hangar.

Leur contenu se devine aisément: ils ont été disposés devant trois "super-congélateurs" affichant près de -70°C.

Chaque colis recèle cinq "plateaux" - en forme de "boîte à pizza" - contenant précisément 195 flacons pas plus gros qu'une phalange.

Pas de temps à perdre, il faut vite extraire la marchandise de sa "carboglace" pour la stocker aussitôt, sans rompre la chaîne du froid polaire.

Mais gare à ne pas trop les secouer. "C'est un médicament très précieux, on ne peut pas se permettre de laisser le congélateur ouvert trop longtemps, encore moins d'avoir un plateau qui casse", explique la pharmacienne Emilie Figueireido, responsable de l'unité logistique du site.

Ce matin, le compte y est presque, à un "plateau" près. "Tout arrive à flux tendu depuis le fournisseur, il peut y avoir des surprises comme ça", soupire Renaud Cateland, directeur de l'Agence générale des équipement en produits de santé (Ageps), qui réceptionne et répartit l'intégralité des médicaments et une partie des dispositifs médicaux de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP, 39 hôpitaux en région parisienne).

Cette plaque tournante achète chaque année pour 1,2 milliard d'euros de produits de santé, avec plusieurs milliers de références distribuées vers 37 sites, jour et nuit - weekend inclus - pour répondre aux commandes parfois urgentes des soignants.

Une mécanique huilée, qui doit composer depuis trois mois avec les flux irréguliers des vaccins anti-Covid.

- "Phase ascendante" -

En plus de l'AP-HP, la plateforme livre désormais l'ensemble des hôpitaux, cliniques et centres de vaccination de Paris et de sa proche banlieue des Hauts-de-Seine. Autant de nouveaux "clients" qu'il a fallu apprivoiser en un temps record, pour s'assurer de livrer les bonnes doses aux bons endroits.

C'est tout l'enjeu de la "préparation": sortis du congélateur, les "boîtes à pizza" sont ouvertes dans une chambre froide, entre 2°C et 8°C, et les 195 flacons reconditionnés en boîtes de 10 ou 20 garnies de mousse ou de polystyrène pour éviter les chocs.

Sur chaque couvercle, une étiquette jaune indique la date et l'heure de décongélation et la limite de péremption, cinq jours plus tard.

Dehors, les convoyeurs attendent: plusieurs camionnettes sont déjà garées devant le bâtiment, qui emporteront bientôt le sérum tant attendu vers ses lieux d'injection - et peut-être aussi, au passage, un paquet de cent seringues spécialement conçues pour récupérer la fameuse "sixième dose" au fond du flacon.

La cadence ne faiblit pas, au contraire. L'Ageps recevait environ 20.000 doses hebdomadaires en début d'année, près de 60.000 la semaine dernière et 90.000 étaient prévues cette semaine.

"On est clairement sur une phase ascendante", constate Laurent Havard, pharmacien chef du service approvisionnement et distribution.

Avec ses trois "super-congélateurs" et ses deux appareils à température plus conventionnelle (pour les vaccins Moderna), il assure pouvoir stocker jusqu'à 240 "plateaux". "On a encore de la marge", assure-t-il.

De quoi "faire trois ou quatre fois plus" confirme M. Cateland, à condition de ne pas "buter sur les ressources humaines", qui ont suivi jusqu'ici grâce à "quelques renforts ponctuels".

L'épreuve de vérité arrive: en avril, la France doit recevoir plus de 12 millions de doses (Pfizer, Moderna, AstraZeneca), autant qu'au premier trimestre.

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