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Julie Douib "m'a dit +il m'a tuée+": sa voisine accable l'auteur de ce féminicide emblématique

"Elle m'a dit +Il m'a tuée+": une voisine de Julie Douib, victime d'un féminicide qui avait suscité une vague d'indignation en France, a accablé l'ex-compagnon de la jeune femme jugé depuis jeudi devant les assises de Bastia pour assassinat.

"Julie, elle était allongée sur le balcon, la tête dans un pot de fleurs vide. Elle gémissait. A un moment donné, elle m'a regardé et elle m'a dit +il m'a tué+, c'étaient ses derniers mots", a raconté, émue, la voisine du dessous de Julie Douib. En entendant son témoignage, le père de la victime a quitté la salle d'audience, au premier jour du procès de Bruno Garcia-Cruciani.

L'homme de 44 ans, crâne rasé, vêtu d'un jean et d'un tee-shirt, est jugé jusqu'au 16 juin pour l'assassinat en 2019 à l'Ile Rousse (Haute-Corse) de Julie Douib, son ex-compagne dont il était séparé depuis quelques mois et avec qui il a eu deux fils. Il encourt la réclusion à perpétuité.

Avant de découvrir la victime, la voisine alertée par les coups de feu, raconte avoir rencontré dans l'escalier M. Garcia-Cruciani: "Il s'est arrêté, il m'a fixé. On ne s'est pas dit un mot".

Une autre habitante a décrit la scène du crime à laquelle elle a assisté depuis le parking de la résidence, alertée par un premier coup de feu: "J'ai vu une personne se jeter sur la dame et la jeter par terre. Ils étaient sur la terrasse. Elle est allongée, lui est sur elle, il l'a maintient au sol en la tenant au niveau du cou. Elle disait +à l'aide, à l'aide+, elle a levé la main. Le deuxième coup de feu est parti à ce moment-là".

En garde à vue, l'accusé a reconnu être venu au domicile de son ex-compagne, armé, "pour lui faire peur", a rapporté à la barre un enquêteur.

- "Pense à tes enfants" -

Un premier coup de feu a été tiré "accidentellement" avant un second, "tiré volontairement" mais dont il ne se "souvient pas bien" du fait d'un "trou noir", tout comme un troisième tir, poursuit le gendarme. Rentré chez lui, l'accusé dit alors à son beau-frère: "J'ai fait une connerie, emmène-moi à la gendarmerie".

Ce même beau-frère était déjà présent la veille des faits, quand Bruno Garcia-Cruciani s'entraînait dans son jardin à tirer avec son pistolet équipé d'un silencieux devant ses enfants, selon le témoignage de ces derniers rapporté par les enquêteurs.

"Ne fais pas ça, pense à tes enfants, si tu fais ça, tu vas les perdre", lance-t-il alors à l'accusé, selon la directrice d'enquête.

Trentième féminicide sur les 146 dénombrés en 2019, le crime avait suscité des questionnements et une vive émotion dans toute la France en 2019, entraînant l'organisation d'un "Grenelle" des violences faites aux femmes.

Julie Douib comme son père mais aussi l'accusé avaient déposé plusieurs plaintes croisées et des mains courantes "dans cette séparation conflictuelle".

Ce procès s'est ouvert au lendemain de l'annonce par le gouvernement de nouvelles mesures après les conclusions d'une mission d'inspection diligentée dans la foulée d'un féminicide commis à Mérignac (Gironde) début mai, qui pointent une série de défaillances dans le suivi du conjoint violent multirécidiviste et la protection de la victime.

Evoquant ce contexte, l'avocat de l'accusé, Camille Radot a dit à l'AFP avant l'audience jeudi qu'il espérait que son client serait "jugé normalement": "On a voulu faire de ce cas un emblème, on ne voit pas pourquoi M. Garcia devrait payer ce prix-là", a-t-il insisté.

Pour la directrice d'enquête, le mobile du meurtre de Julie Douib "est lié à une rupture mal digérée et à une liaison secrète (de la victime) avec un prof de sport".

"Ce qu'il a fait vivre à Julie Douib, il l'avait déjà fait vivre à Saveria", une précédente compagne, a-t-elle assuré.

A la barre, elle a relaté les violences subies par Saveria, absente au procès, "complètement terrorisée" lors de son audition en 2019 pour les besoins de l'enquête, quatorze ans après leur séparation.

Evoquant le fait qu'il venait de découvrir que Julie Douib avait un nouveau compagnon, l'accusé a déclaré en garde à vue: "J'étais écoeuré le vendredi, décomposé le samedi, le dimanche, il s'est passé ce qu'il s'est passé", rapporte à la barre un autre enquêteur.

L'accusé, qui n'a pas encore été entendu, doit l'être vendredi.

"J'attends juste qu'il nous dise la vraie vérité", avait dit le père de Julie Douib, Lucien, à la presse, jeudi matin.

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