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La recherche sur les cancers pédiatriques plus lente que pour les cancers d'adultes? "C'est une évidence"

Les cancers pédiatriques sont des cancers à part entière qui nécessitent des moyens à part entière. Vous allez encore un peu mieux le comprendre ce midi grâce à Anabelle Decottignies, maître de recherches FNRS confirmée à l'institut Deduve, qui était l'invitée d'Alix Battard dans le RTL INFO "Avec Vous". 

Pour bien comprendre l'enjeux. IL y a cette statistique assez effrayante. 2 patients sur 3, traités par chimiothérapie pendant l'enfance vont présenter des effets secondaires au moins 1 effet secondaire à long terme. De quels effets secondaire parlent-on ? Quels sont les plus fréquents ? 

Il y a d'abord les cancers secondaires qui peuvent résulter du traitement initial. Puis il y a toute une série de pathologies qui peuvent s'installer au niveau du coeur, des reins, de l'ouie aussi, au niveau du système neurologique donc on a des problèmes de mémoire et de concentration qui sont assez importants aussi.

De manière générale, le corps va subir un vieillissement prématuré donc c'est comme si le corps vieillissait trop vite. Et donc ces enfants vont développer des maladies que normalement on ne développe qu'à la vieillesse. 

Mais ça peut se manifester des années plus tard? 

Oui des années plus tard, souvent 5-10 ans après la thérapie, on a déjà pas mal d'effets qui se manifestent. Donc ici il y a une étude qui a été faite il y a pas longtemps sur des enfants qui ont eu des cancers du cerveau, moyenne d'âge de 22 ans, et donc ces personnes post-traitement avaient des effets de vieillissement comme des personnes de 60-70 ans. Donc il y a vraiment un effet très fort de la thérapie.

Dans l'espoir d'améliorer la qualité de vie de ces anciens patients, vous travaillez actuellement sur un projet d'étude. Vous pouvez nous expliquer de quoi il s'agit? Qu'est ce que vous essayez de comprendre? 

Le projet qu'on va essayer de lancer c'est vraiment pour des enfants qui ont subi une chimiothérapie, car à l'heure actuelle, il n'y a pas d'autres alternatives, donc qu'est ce qu'on peut faire pour essayer d'empêcher ces effets secondaires? Ce qu'on va essayer de faire c'est d'avoir des mesures très biologiques, très longitudinales de tous les effets de la chimio, donc autant au niveau cognitif que physique. On va donc prendre des échantillons de sang, de cellules de ces personnes pour un peu voir les effets que ça a eu. Pour dans le futur, essayer de contrecarrer les effets néfastes de la thérapie. 

Pour ce projet pour travaillez en collaboration avec Maelle de Ville, oncologue pédiatrique aux cliniques universitaires Saint-Luc. C'est indispensable pour ce type de projet, que Chercheur et médecin travaillent main dans la main ?  

C'est crucial. Parce que moi je n'ai pas accès aux patients. Si elles ne sont pas là en amont, moi je ne peux pas les avoir... Donc c'est vraiment crucial. C'est une synergie absolument indispensable. 

Alors il y a un mais. Pour que ce projet se fasse. Il vous faut des moyens. des fiancements ? C'est la réalité aujourd'hui pour que ce projet puisse aboutir, il faut de l'argent ?

On a besoin d'argent oui parce que la recherche fondamentale n'est pas financée par le privé. La recherche fondamentale, on ne produit rien qui rapporte de l'argent, on produit de la connaissance mais ça ne rapporte pas de l'argent. Donc oui il faut financer les chercheurs, les laboratoires, etc. Tout ça a besoin de financement et c'est pour ça que le Télévie est merveilleux à cet égard. Mais pas que, on reçoit aussi des financements par exemple de la fondation contre le cancer. C'est vraiment crucial. 

Ca fait partie à part entière de votre travail de chercheuse, c'est-à-dire qu'à côté de ça, vous devez démarcher et trouver des fonds pour financer les chercheurs qui travaillent sur vos projets d'études? 

Oui, il y a une grosse partie de mon temps que je consacre à chercher de l'argent pour mes chercheurs, faire fonctionner mon labo. Donc oui chercher de l'argent fait partie de notre travail, c'est aussi notre quotidien. 

Comment vous le vivez que des projets aussi passionnants que le votre dépendent d'argent? 

Oui c'est toujours la grosse frustration de la recherche. Après ça fait des années, on vit comme ça, c'est notre monde. 

Il y a moins de recherche en oncologique pédiatrique ?

Oui parce que le cancer pédiatrique est un cancer rare. Donc qui dit rare dit moins de financement... Entre autre, parce que les groupes pharmaceutiques vont plutôt financer des projets qui vont être destinés à trouver des thérapies pour les adultes qui sont beaucoup plus fréquents. 300 cancers d'enfants par an en Belgique contre 70 000 adultes par an chez nous.

Vous pensez qu'on a pas progressé dans certains cancers pédiatriques depuis des années parce qu'on manque de moyens et qu'on n'a pas bénéficié des mêmes moyens que pour les cancers d'adultes? 

Je pense pas, c'est une évidence. De fait, il y a certains cancers, comme le cancer de l'os chez l'enfant pour lequel il n'y a aucun essai clinique innovant en cours, on est encore avec des thérapies des années 80 qui sont très toxiques et qui ont des effets secondaires néfastes. Oui effectivement c'est une évidence. 

Il y a cette recherche dont vous venez de nous parler sur l'accélération de la vieillesse des tissus des enfants qui ont subi des chimio. Est-ce que vous travaillez sur d'autres projets qui ont déjà démarrés et qui sont prometteurs? 

Oui on travaille aussi en amont, pour essayer de développer des thérapies moins nocives. Et on travaille aussi pour améliorer le diagnostic de certaines maladies, dans l'espoir de faire des thérapies ciblées, des thérapies personnalisées pour les enfants. 

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