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"Les camionneurs ne se gênent pas pour effectuer des dépassements là où c'est interdit", estime Maxime: que dit la loi? Des contrôles sont-ils réalisés?

Les camions sont parfois tentés de dépasser là où ils ne peuvent pas le faire. C'est ce que dénonce Maxime qui nous a contactés via le bouton orange alertez-nous. Selon lui, il s’agit d’une vraie problématique. À quel point ce comportement est dangereux ? Les contrôles sont-ils suffisants ?

"La E411 est remplie de panneaux qui interdisent aux camions tout dépassement de 6h à 19h. Pourtant, ces panneaux sont massivement ignorés par les camionneurs qui ne se gênent pas pour effectuer des dépassements sur des portions de route où il n’y a que deux bandes", regrette Maxime via le bouton orange Alertez-nous. 

Pour bien comprendre, il convient de relire la législation en vigueur. Jusqu'en 2018, le Code de la route indiquait qu'aucun camion ne pouvait dépasser hors agglomération sauf quand il circule sur des voies à 3 bandes de circulation ou plus. "Le dépassement par la gauche d'un véhicule attelé, d'un véhicule à moteur à deux roues ou d'un véhicule à plus de deux roues est interdit", pouvait-on lire dans le point 7 de l'article 17.2 du code de la route". 

Trois ans après l'application de cette nouvelle mesure, quel bilan peut-on tirer? Pour Mickaël Reul, secrétaire général de l'Union professionnelle du transport et de la logistique (UPTR), c'est "la fin d'une mesure d'une stupidité sans nom". "On est retourné à la logique du Code de la route. Par principe, ce qui n'est pas interdit est autorisé", estime le porte-parole. 

Un but: harmoniser la législation

Car le problème, c'est que cette mesure entrait en contradiction avec la législation des autres pays d'Europe. Car partout ailleurs, c'est l'inverse qui prévaut. Les camions sont autorisés à dépasser partout sauf lorsque des panneaux d'interdiction sont placés. Cela engendrait donc de la confusion pour les chauffeurs poids lourds, surtout pour les conducteurs étrangers. "Plus d'un tiers des chauffeurs de camions impliqués dans un accident corporel en Wallonie sont de nationalité étrangère", rappelle l'Agence wallonne pour la Sécurité routière (AWSR). 

Le 1er avril 2018, une nouvelle mesure entrait en vigueur dans le Code de la route pour pallier cette incohérence. Afin de laisser le temps aux gestionnaires des routes d'adapter la signalétique, la mesure n'a pris effet qu'au 1er janvier 2019. À partir de cette date, les camions sont autorisés à dépasser sur les routes et autoroutes à 2x2 bandes. "Plutôt que d'interdire le dépassement partout, on a décidé de l'autoriser partout sauf à des endroits où c'est vraiment nécessaire de l'interdire afin d'assurer la sécurité des usagers qui empruntent les autoroutes et routes à 2x2 bandes", éclaire Belinda Demattia, porte-parole de l'AWSR. 

Il reste donc des exceptions signalées par un panneau d'interdiction. Les Régions sont habilitées à imposer une interdiction de dépassement sur certains tronçons.

Plusieurs critères existent pour définir les zones d'interdiction à dépasser: 

  • la configuration des lieux est jugée dangereuse. "Si on a un virage très serré ou une forte cote par exemple, dans ce cas, on va interdire le dépassement sur un tronçon car ça peut être un facteur d'insécurité", indique Belinda Demattia. 
  • la densité de trafic : pour les sections d'autoroutes accueillant plus de 45.000 voitures et plus de 3.000 camions, des restrictions existent. Il est alors interdit aux camions de plus de 3,5 t de dépasser entre 6h et 19h. "Pendant la nuit, les camions peuvent doubler sur ces portions car c'est vraiment lié au trafic", souligne la porte-parole. 

De plus, par temps de pluie, il reste interdit aux camions de dépasser pour plusieurs raisons:

  • En roulant, les camions causent des projections d'eau, réduisant ainsi la visibilité des automobilistes en cas de dépassement
  • En cas de route humide, leur distance de freinage est plus longue
  • Un accident sur 10 impliquant un camion a lieu par temps de pluie

Entre 2019 et 2021, 1.636 infractions de dépassement en période de pluie ont été constatées. Parmi elles, 61,7% ont été relevées en Flandre, 37,9% en Wallonie et seulement 0,4% à Bruxelles. On observe que le nombre d'amendes a augmenté au fil des années. Sur les 1.636 infractions, 11,4% ont été constatées en 2019 contre 55,5% en 2021.

L’an dernier, 2.747 poids lourds ont été mis à l’amende dont près de 700 en Wallonie. Les autorités reconnaissent que le contrôle de ces règles est difficile. Cette infraction reste cependant difficile à contrôler. "Il faut les prendre en flagrant délit de dépassement. Et puis on sort d'une période où le trafic était très limité avec les mesures sanitaires donc les poids lourds ont peut-être eu l'habitude d'avoir la route à eux tous seuls et de moins respecter cette mesure", explique Belinda Demattia. Aucune statistique précise n'existe sur le respect de cette règle, trois ans après son instauration. "Même si l'on peut avoir le nombre d'infractions commises, ça ne reflète pas forcément la réalité, car c'est difficile à contrôler", ajoute la porte-parole. 

Quelques chiffres

En moyenne, on compte 2 accidents avec lésions corporelles tous les mois, et un décès tous les ans. En 2021, 1.731 accidents impliquaient un poids lourd en Belgique, dans lesquels 92 personnes ont perdu la vie et 2.102 blessées. 81% des accidents des poids lourds ont lieu en journée de semaine. 20% des accidents impliquant un camion sont dus au non-respect des distances de sécurité. 

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