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Dans son jardin à Waterloo, Erdem parvient à faire pousser... des bananes: "Je suis très surpris et je trouve cela amusant"

Des bananes poussent à ciel ouvert en Belgique. Erdem nous a envoyé des photos de son bananier via le bouton orange alertez-nous. Il s’étonne de voir des petites bananes pousser dans son jardin. Et se pose plusieurs questions : est-ce lié au dérèglement climatique ? Pourrait-on voir d’autres fruits et légumes plus exotiques pousser chez nous à l’avenir ?

Erdem, chauffeur de bus à la Stib, n'en revient pas. Sur son bananier, des fleurs ont récemment fait leur apparition. "Il y a quatre belles fleurs avec des bananes qui, je l’espère, vont arriver à maturité. Je suis très surpris et je trouve cela amusant. Cela montre à quel point les températures changent, selon moi… Il fait de plus en plus chaud en Belgique", nous confie-t-il. L'habitant de Waterloo nous explique avoir reçu ce bananier, il y a 4 ans. "Mon beau-père me l’a donné quand il faisait encore 15-20 centimètres. Je pense que s’il voyait son bananier aujourd’hui, il serait jaloux, parce qu’il n’a jamais eu ça", confie-t-il. 

Passionné de jardinage, Erdem semble avoir trouvé l'astuce pour faire fleurir son bananier. "Au début j’ai arrosé pas mal. Mais pour l’entretien, je ne fais rien, sauf arroser s’il ne pleut pas. Cela va tout seul, c’est comme une mauvaise herbe", souffle-t-il. Aujourd'hui, il se dit surpris. Il se s'attendait pas à voir des bananes mûrir dans son jardin à Waterloo. "Dès que j’ai vu ça, je me suis dit que c'était dû au réchauffement climatique. La météo change un peu partout dans le monde. Des endroits où il fait très froid, il fait très chaud maintenant. Et inversement aussi. Je pense que ces bananes dans mon jardin en sont la preuve", souligne-t-il. 

Il n’est pas étonnant de voir des bananes pousser sur un bananier

Pour l'heure, ces bananes restent cependant minuscules. "J’ai essayé d’en ouvrir une, mais il n’y a pas grand-chose dedans. Mais si j’en ai l’occasion, je les mangerai. Ce sont des bananes 100% organiques après tout", nous dit-il. 

Comment expliquer que des bananes puissent voir le jour en Belgique ? "Il n’est pas étonnant de voir des bananes pousser sur un bananier. Après tout, c’est assez logique. Voir des fleurs sur un bananier, cela veut dire qu’il est vieux et qu’il essaye de se reproduire. Comme c’est une herbacée, après sa floraison, il fait sa fructification. Donc il va gentiment mourir et faire la place aux plus jeunes pousses", nous éclaire Brigitte De Taffe, pépiniériste.

Habituellement, la production de bananes se fait dans des pays tropicaux où le climat est chaud et humide. "Dans ces conditions, on peut avoir des bananes en 7 mois. Ici en Belgique, on a des bananiers pendant plusieurs années et un moment ils sont assez vieux pour faire des bananes. Mais ce n’est pas certain qu’elles iront jusqu’à maturité", explique la pépiniériste. D'autant plus que notre pays connaît des périodes de canicule et de sécheresse. "Ce que les bananiers ne connaissent pas dans leurs pays tropicaux", ajoute la spécialiste. 

Depuis 1890, l'Institut royal météorologique de Belgique (IRM) observe que la température annuelle moyenne a augmenté en Belgique entre 1,8° et 1,9 °C, avec une nette accélération depuis 1954. En 2100, selon les projections, le réchauffement se situerait entre +0,7 °C et +5 °C avec une augmentation plus marquée en hiver qu'en été. Le nombre de vagues de chaleur serait également en augmentation. 

Le Belge consomme en moyenne 7,42 kilos de bananes en Belgique, ce qui en fait le fruit le plus populaire (selon une étude réalisée par la société GfK Belgium auprès d'un panel de 6.000 familles belges à la demande du centre flamand de marketing agricole et de la pêche).

Au vu de l'augmentation progressive des températures, leur production sera-t-elle bientôt possible sur notre territoire ? "C'est peu probable et un peu utopique", sourit José Renard, secrétaire général de la Fédération wallonne de l'agriculture. Néanmoins, depuis quelques années, au vu des changements climatiques, les agriculteurs doivent s'adapter. 


"Il y a une réflexion de diversifier des cultures et d'avoir des espèces qui supportent mieux les variations de températures telles qu'on connaît aujourd'hui", éclaire le secrétaire général. Avant d'ajouter: "L'objectif vers lequel on doit tendre est celui de la résilience de l'agriculture par rapport à toutes ces fluctuations. Parce qu'on voit que sur une même année, on peut avoir une période de déficit en eau et une période d'excès. Il faut des plantes qui puissent d'une façon ou l'autre pouvoir supporter ces variations de climat et pouvoir redémarrer".

On reste ouverts à d'autres cultures

Cette adaptation peut cependant comporter de réels risques pour les cultivateurs. "Chaque nouvelle culture implique un risque parce que l'on n'a pas nécessairement le recul sur 100 ans de culture. En agriculture, on doit observer sur plusieurs années car on sait que les conditions climatiques parasitaires ne sont pas les mêmes d'une année sur l'autre. Quand vous vous lancez la première année, c'est un peu un saut dans l'inconnu. Il faut que l'agriculteur puisse avoir des partenaires dans la chaîne alimentaire qui acceptent de partager ce risque", explique José Renard. 

Christophe, agriculteur à Grez-Doiceau, fait partie de ceux qui ont sauté le pas. Ce cultivateur s'est lancé dans la culture de blé dur en novembre 2021. "Visuellement, ça ressemble à un blé tendre classique pour la farine de pain. Mais il y a une petite différence au niveau du grain. Il peut servir pour les pâtes et la semoule", explique-t-il. 

"Je sais que l'on parle beaucoup d'autres cultures comme le tournesol. Donc à terme, pourquoi pas ? (...) On reste ouverts à d'autres cultures moyennant la problématique des nouveaux outils. On vise quand même la sécurité avant toute chose", confie-t-il. Pour cette diversification, Christophe n'a pas dû investir dans de nouvelles machines. Le procédé de récolte étant le même que pour le blé dur. 

En Italie, des agriculteurs délaissent progressivement leurs cultures d'orange pour se tourner vers les fruits tropicaux. Une enquête du journal italien L'Espresso révèle qu'entre 2016 et 2021, la culture des fruits tropicaux est passée de 10 à 500 hectares en Italie. À l'inverse, les cultures des citrons et des oranges ont reculé respectivement de 50 et de 30%. Des bananes mais aussi des mangues, des avocats ou encore des papayes voient ainsi le jour dans ce pays européen. 

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