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Séverine doit payer l'entièreté de sa cuisine avant son installation: est-ce légal?

La maison de Séverine est en plein travaux. Sa cuisine devrait bientôt être installée, mais un point dans les conditions de vente l'interpelle: "Il est écrit qu'on doit solder la cuisine 15 jours avant le placement" explique-t-elle. Selon Séverine, cette pratique est complètement illégale, raison pour laquelle elle a décidé d'appuyer sur le bouton orange Alertez-nous.

Séverine est accueillante d'enfants pour l'ONE, et a décidé de construire une extension à sa maison pour séparer sa vie privée et professionnelle. "On a tout cassé pour placer une nouvelle cuisine" dit-elle. Mais au moment où elle reçoit les conditions générales de vente par mail, elle se rend compte qu'elle doit payer cette cuisine dans son entièreté, avant même son installation.

Un acompte de 30% avait pourtant déjà été payé, Séverine ne comprend donc pas pourquoi elle est contrainte de payer une somme aussi importante en une seule fois : "Je trouve plus logique de payer un montant sur la cuisine au moment du placement, mais de garder cette sécurité s'il y a un souci" explique Séverine. "Je me dis que s'il y a un souci quelconque, je vais devoir retourner vers le service après-vente et je n'ai pas envie de partir dans les coups de fils, les mails…" déplore-t-elle.

Au fil de discussions avec ses proches, Séverine en conclut que cette pratique n'a pas de sens : "On était dans la précipitation de trouver vite une cuisine dans les délais impartis, donc on a payé tout de suite l'acompte et on n'a pas discuté. Si je n'étais pas si pressée, j'aurais réfléchi à deux fois".

Une pratique courante

Si Séverine était moins prise par le temps, elle aurait pu chercher un autre cuisiniste, mais aurait eu des difficultés à en trouver : "Dans le secteur, comme dans d'autres, c'est une pratique qui se fait régulièrement" explique Gilles Denis, le président de l'Union Professionnelle des Ensembliers de la Cuisine Equipée (UPEC). Les meubles étant considérés comme des éléments "immobiliers" de la maison, "il est très difficile pour nous, en cas de non-paiement, de récupérer la marchandise, vu qu'elle est fixée aux murs", justifie ce dernier.

Mais comment s'assurer que sa cuisine sera conforme à ce qui est prévu, alors que tout est déjà payé ? "Les membres de l'UPEC ont tous signé une charte de qualité qui garantit un service après-vente optimal et une pose dans les règles de l'art. On est là pour s'assurer que tout se passe bien lors de la livraison. En cas de problème, nous rappelons nos membres à l'ordre et leur rappelons la charte de qualité qu'ils ont signée", affirme Gilles Denis.

Comment faire valoir ses droits ?

Test Achats ne voit pourtant pas cette pratique du même œil. Son porte-parole Jean-Philippe Ducart estime que "quand on demande la totalité du payement, et donc de couvrir la totalité des travaux, c'est un peu suspect, et on ne part pas dans de bonnes conditions. Un moment donné, vous ne pouvez plus vous ménager à un recours".

L'association des consommateurs conseille donc de "négocier au mieux les tranches de payement et le bon de commande. Vous allez payer sans doute un acompte à la signature, un acompte au début des travaux et puis vous allez payer le reste soit aux deux tiers, soit à la fin des travaux", détaille Jean-Philippe Ducart. Le client est toujours en droit de négocier son contrat, car "les conditions générales, ce n'est pas quelque chose de bétonné et qui doit être imposé à tous les consommateurs" ajoute-t-il.

À l'heure actuelle, il n'y a aucune disposition légale spécifique interdisant cette pratique. Le Code du droit économique dit cependant que "obliger le consommateur à exécuter ses obligations, alors que l'entreprise n'aurait pas exécuté les siennes ou serait en défaut d'exécuter les siennes" peut être considéré comme "abusif". Seul un juge pourra se prononcer sur le caractère abusif ou non de la clause.

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