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D'une équipe mixte à superstar des Red Flames: Tessa Wullaert revient sur son incroyable parcours (vidéo)

Tessa Wullaert, c’est une formidable histoire. Passée par des équipes mixtes, la native de Tielt est devenue l’une des plus grandes joueuses de l’histoire des Red Flames. Emblème de notre équipe nationale féminine, elle a accepté de s’exprimer sur son parcours et l’approche de son sport.

Tessa Wullaert découvre le football dès sa plus tendre enfance. "J’ai commencé à l’âge de 5 ans. Avant cela, j’avais dansé, mais je n’ai pas vraiment de rythme, ce n’était pas pour moi", plaisante aujourd’hui la joueuse aux 50 buts en sélection.

Lancée dans la cour de récréation, Tessa est découverte par un entraîneur dans son propre jardin. Il s’agissait en réalité d’un ami de son papa, lui-même joueur de foot à l’époque. "Il a dit à mon papa que je savais faire des bons trucs avec le ballon. Il pensait que j’avais du talent et que je devrais commencer à jouer au foot", se souvient très bien l’attaquante. 

Tout va alors s’accélérer et Tessa Wullaert va intégrer un club de village. Avec la spécificité de jouer dans une équipe mixte, ce qui n’a pas manqué de faire réagir. « Je me souviens que mes parents et mon grand-père me conduisaient au foot. Mon grand-père avait toujours mes chaussures avec lui », raconte-t-elle. "Je jouais avec des garçons, mais j’avais la chance d’avoir encore une fille dans mon équipe. On était toutes les deux douées. On jouait à 5 contre 5 et l’adversaire pensait toujours ‘ok, il y a deux filles, ça fait presque 50%. On va gagner facilement’. Au final, on a battu toutes les équipes cette saison-là", rigole-t-elle ensuite.

 

Professionnelle précoce

Tessa Wullaert impressionne ses entraîneurs et songe assez vite au football professionnel. "Même si je voulais absolument poursuivre des études, parce qu’avoir un diplôme est important", nous précise-t-elle tout de même.

Elle débute officiellement sa carrière en 2008, à seulement 15 ans, à Zulte Waregem. Elle fait ses premiers coups de force à Anderlecht entre 2012 et 2013. Par la suite, l’attaquante brille au Standard, à Wolfsburg, à Manchester City avant de retrouver Anderlecht cette saison.

Partie à l’étranger à 22 ans, tout n’a pas toujours été facile. "C’était un bon choix, que j’ai pris 100% par moi-même. Mon copain m’a soutenu. J’avais 22 ans, c’était le bon moment. C’était bien, j’ai vécu ma jeunesse là-bas, je sortais pas mal, mais ce n’était pas facile de vivre à l’étranger, de parler une autre langue, surtout que j’étais seule. Ce n’était pas facile mais ça a fait de moi la personne que je suis aujourd’hui", raconte la Belge.

Âgée de 27 ans, elle a découvert la sélection belge dans les équipes d’âge, entre 2008 et 2011. "Je me souvient qu’en U19, je pouvais déjà m’entraîner avec les A. Mais ils ne voulaient pas prendre de risque, j’étais trop jeune, donc je ne pouvais pas jouer avec elles", nous explique Tessa Wullaert.

Mais elle se souvient très bien de son entrée en lice chez les Red Flames, il y a déjà dix ans. "C’était contre la Russie. J’ai marqué directement, c’était un bon début", sourit l’attaquante. Alors qu’elle aurait pu arriver avec une certaine appréhension, la jeune attaquante était finalement assez détendue au moment de découvrir son nouvel environnement.

"Je pense que celles qui découvrent le groupe maintenant ont plus de pression que moi à l’époque", estime-t-elle d’ailleurs. "Il n’y avait pas d’attention des médias, pas la pression des réseaux sociaux… moi je n’avais pas de stress. Comme toujours, je ne pensais qu’au plaisir". Mais tout ne s’est pas tout de suite passé comme prévu.


 
"Je voulais quitter l’équipe nationale"

En 2011, à son arrivée dans le groupe des Red Flames, Tessa Wullaert ne se sent pas très en confiance. Et les mois suivants, elle se met à douter de son futur en sélection. "Je voulais quitter l’équipe nationale, parce que ce n’était pas cool pour moi. Je ne connaissais personne, je ne prenais pas de plaisir…A un moment, je me suis demandé ce que c’était que cela. Je suis allée parler de cela à Aline Zeler", poursuit-elle.

Aline Zeler, c’est une des emblèmes de la Belgique du football. Capitaine réputée et appréciée, elle a pris le temps d’écouter sa toute jeune équipière, âgée alors de 18 ans. "Elle avait 10 ans de plus que moi. Quand je suis allée lui parler, elle a accepté de s’occuper de moi. Cela a tout changé, c’était beaucoup plus agréable. Alors je suis restée et je ne suis pas encore partie", sourit Tessa Wullaert.

Je ne vois pas pourquoi nous ne mériterions pas de gagner plus.

Aline Zeler reste d’ailleurs la personnalité la plus marquante que l’attaquante ait croisée sur sa route internationale. "Elle était très importante pour moi, du début à la fin. On était très proches, parce qu’on a joué ensemble au Standard, on y a remporté des titres. On a beaucoup de souvenirs ensemble, on s’échauffait toujours ensemble. Elle était la capitaine, très importante pour l’équipe et elle me manque", témoigne-t-elle.

Aline Zeler a décidé de quitter la sélection en 2019, après avoir joué 111 matchs avec les Flames. Elle a depuis repris du service à Genk.

"La majorité des Flames travaillent à côté"

En dehors des terrains, Tessa Wullaert est loin d’être inactive. D’autres Red Flames ne peuvent d’ailleurs pas se permettre de l’être. "La majorité de nos joueuses travaillent ou étudient à côté", nous raconte d’ailleurs l’Anderlechtoise. "Nous avons par exemple quelqu’un qui est coach personnelle, une qui est psychologue ou quelqu’un qui travaille dans une brasserie. C’est ça la réalité", raconte-t-elle.

Ce rapport à l’argent, cela énerve Tessa Wullaert. Parce qu’aujourd’hui encore, certains pensent que les joueuses ne méritent pas un salaire supérieur. Or, selon Libération, le salaire moyen d’une joueuse en France n’est que de 2494€ brut, contre près de 100.000 pour un homme. Soit 40 fois moins.

Une situation qui déçoit grandement notre internationale belge. "Je ne vois pas pourquoi nous ne mériterions pas de gagner plus", s’insurge-t-elle. "Nous avons tellement de passion qu’en Belgique, des filles travaillent à côté du football. Et s’entraînent ensuite à 20h, avec 4 entraînements par semaine en plus du match. Ce n’est pas évident, ça s’est amélioré en équipe nationale mais c’est discriminatoire. C’est dommage que nous devions mettre tellement de temps dans ce sport pour gagner si peu d’argent".

Elle, de son côté, a la chance de vivre de son métier de footballeuse. Rappelons que, comme les hommes, les femmes ne touchent « que » des primes en sélection. Ce sont bien les clubs qui payent leur salaire pour celles qui en ont un. Mais Tessa Wullaert refuse de ne faire que de jouer au football. Avec d’autres joueuses des Flames, elle travaille pour devenir entraîneuse. "Je suis en train de suivre des cours. Nous avons déjà l’UEFA B et nous espérons décrocher l’UEFA A. Cela concerne aussi des Red Flames actuelles et d’anciennes joueuses", détaille ensuite l’attaquante.

Mais pour déjà mettre en pratique les conseils donnés, Tessa Wullaert encadre de jeunes joueuses, âgées de 8 à 12 ans. Maintenant qu’elle a une belle réputation, la Belge jouit d’un beau crédit. Ce qui crée des situations étonnantes. "Je sens qu’elles ont beaucoup de respect pour moi. Parfois, elles me disent « excusez-moi madame », ou quelque chose comme cela. Je dois leur répondre que je suis juste Tessa, que je suis là pour les entraîner", rigole-t-elle.

Son maître mot : leur transmettre son plaisir de jouer au foot. "Je pense que c’est le plus important. Après, il faut trouver le bon mix entre le plaisir et le fait d’apprendre quelque chose. Je leur donne donc des exercices à faire à la maison et la semaine suivante, je leur demande de me montrer ce que cela donne. Elles sont très enthousiastes", se réjouit la Red Flames.

"Nous sommes plus passionnées que les hommes"

Elle en profite pour distiller quelques conseils à ces jeunes filles, alors que le football féminin continue à faire l’objets de railleries. "Je leur dis de toujours prendre du plaisir, c’est comme ça qu’elles vont progresser. Je leur conseille de faire des choix qui les rendront heureuses, en étant 100% certaines de leurs choix sans écouter les autres".

Les détracteurs, Tessa Wullaert s’en moque un peu. Mais elle tient par contre à convaincre des sceptiques de s’intéresser aux Red Flames. "Nous sommes toutes des passionnées. On ne joue pas vraiment pour l’argent, on n’en gagne pas assez. On joue parce qu’on veut jouer au foot, j’ose dire que nous sommes plus passionnées que les hommes", conclut-elle sans hésitation.

Si elle admet que le football est différent de celui pratiqué par les Diables, elle réfute l’idée que leurs matchs ne soient pas spectaculaires. "Nous avons aussi du spectacle. Nous voulons gagner, on marque de beaux buts, il y a des belles phases et du spectacle", rétorque-t-elle. « Les hommes ont plus de force et de vitesse que nous. Nous nous concentrons davantage sur la technique", précise-t-elle enfin.

En 2022, les Red Flames disputeront l’Euro. Tessa Wullaert en sera, sauf gigantesque retournement de situation. Avec comme ambition de franchir un palier et de sortir de la phase de poules. Elles pourront compter sur le soutien des fans belges !

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